Message de la Directrice générale de l’UNESCO Audrey Azoulay, à l’occasion de l’anniversaire de l’inscription du point d’Alençon sur la Liste du patrimoine immatériel 

Audrey Azoulay

DR - UNESCO -

Novembre 2020

"C’est avec un grand plaisir que nous célébrons, ce mois-ci, le dixième anniversaire de l’inscription du point d’Alençon sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO.

Cette reconnaissance est rare, car elle ne distingue pas seulement une pratique, même exceptionnelle : elle célèbre aussi la transmission qui lui permet d’exister et d’être vivante.

C’est précisément ce qu’est la dentelle à l’aiguille d’Alençon. Si elle a rejoint la liste du patrimoine immatériel il y a dix ans, c’est d’abord parce qu’elle est un artisanat exceptionnel, qu’il faut huit à dix années pour apprendre, et une vie entière pour maîtriser.

Mais c’est surtout parce que ce savoir-faire ne s’apprend, ni ne se porte, jamais seul. Chaque geste appris, et jusqu’à l’art de la patience nécessaire pour ce travail minutieux, renvoient immanquablement aux centaines de mains qui se sont succédé à l’ouvrage, et à cette très longue série de confections et d’apprentissages que chaque dentelle prolonge à sa manière.

La finesse des voiles de mariée de Corinne Sentou, ou le réalisme saisissant des Mouches de Didier Trenet, montrent combien cet héritage regarde vers l’avenir, et combien il offre un espace de liberté créatrice à l’imaginaire des artistes contemporains.

Ce textile d’exception qu’est le point d’Alençon incarne ainsi bien plus qu’un simple savoir-faire : à la virtuosité du geste se mêlent, pour chaque dentelle, la créativité contemporaine et la fierté collective – car la dentelle est aussi le symbole de toute une identité régionale. 

C’est à ces différents titres que le point d’Alençon a rejoint la liste du patrimoine immatériel de l’humanité, cet inventaire des expressions culturelles, que l’humanité a reçu en héritage et qu’elle a le devoir de faire vivre, pour mieux les transmettre.

Le meilleur moyen de protéger ces traditions est en effet de les faire, de les investir, de les réinventer, comme le font les dentelières d’Alençon lorsqu’elles dessinent, brodent et éboutent au quotidien.
C’est donc à ces femmes et à ces hommes qu’il faut rendre hommage en cet anniversaire, car sans leur travail et sans leur talent, c’est un peu du patrimoine de l’humanité qui se perdrait irrémédiablement."
 

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